Epandage des lisiers
Le deuxième volet de notre trilogie sur les recommandations pour réussir son chantier d’épandage est consacré aux tonnes à lisier. Pour cet article, Herb’actifs a interviewé Aurélien Nucéra et Christophe Marzin, respectivement responsable marketing et chargé de produits chez Pichon.
Herb’actifs : quels sont vos conseils pour améliorer l’efficacité des chantiers d’épandage de lisier ?
Il faut brasser la cuve à lisier car sa richesse est au fond
Aurélien Nucera : Réussir son chantier nécessite une bonne préparation. Celle-ci passe par un brassage de la fosse à l’aide d’un broyeur de fosse. Nous recommandons de réaliser cette opération au moins une fois par mois. En effet, le lisier reste dans la fosse environ 6 mois par an. Durant cette période, les sédiments, qui sont les éléments riches en N, P et K, tombent au fond de la cuve, tandis que le liquide reste au dessus. Ce phénomène est accentué à chaque averse.
Christophe Marzin : Un lisier non brassé sera pompé difficilement. De plus, il risque de boucher l’outil d’épandage. Un lisier mal brassé aura une composition peu homogène, ce qui entraine une répartition hétérogène des éléments nutritifs dans la prairie.
Par ailleurs, si les prairies sont éloignées, il peut être judicieux d’équiper la tonne d’un mélangeur intérieur pour empêcher le lisier de sédimenter pendant les trajets.
La valorisation au champ du lisier va dépendre du type d’épandeur
A.N : Les tonnes équipées de buses palettes constituent l’essentiel du parc français. Or avec des buses palettes, la largeur d’épandage a un coefficient de variation longitudinale et transversale de 15 % à 40 %. L’épandage devient alors très aléatoire et donc créer dans les prairies des zones surfertilisées, notamment par recouvrement, et sous-fertilisées. De plus, on sait qu’avec ce système il y a une perte d’azote par volatilisation ammoniacale d’environ 50 % de l’azote épandu. Enfin, avec ce type de tonne à lisier, c’est la vitesse d’avancement du tracteur qui va décider du débit. Les tonnes équipées de buses palettes ne sont donc pas idéales pour valoriser au mieux le lisier dans vos prairies.
C. M : À l’inverse, des épandeurs avec rampes pendillards ou avec enfouisseurs, dont la largeur de travail est connue et fixe, offrent un contrôle de la répartition dans la parcelle. De plus, on estime au maximum les pertes par volatilisation ammoniacale avec ces machines à respectivement 10 % et 5 %. Elles permettent donc de mieux valoriser le lisier. Pour les prairies, nous conseillons des enfouisseurs à disques ou à patins qui ne vont pas rentrer trop profondément dans le sol.
Pour éviter le tassement, surveiller la pression des pneus
C.M. : Le risque de tasser/compacter son sol doit être pris en compte dans un chantier d’épandage de lisier, car cela peut provoquer du ruissellement. Pour avoir la bonne pression de pneus dans la parcelle, certaines tonnes sont équipées du télégonflage, qui permet de passer de 4 bars à 2,6 bars.
Y-a-t-il des conseils particuliers pour épandre la bonne dose ?
Epand’app, pour les machines dépourvues d’automatismes
A.N. : La Chambre d’Agriculture de Bretagne a développé en 2014 l’application Epand’App qui aide à régler les tonnes à lisier équipées de buses palettes et dépourvues d’automatismes pour appliquer la dose souhaitée dans les champs. Si en plus vous avez fait analyser votre lisier, vous pouvez la paramétrer avec les valeurs N/P/K puis choisir la dose d’azote souhaitée pour obtenir les réglages adéquates. Lien vers l’application Epand’App.
Equiper la tonne avec un DPA
A.N. : Les systèmes de Débit Proportionnel à l’Avancement sont disponibles sur des tonnes avec rampes pendillards ou enfouisseurs, ils permettent une répartition très homogène sur la parcelle quelle que soit la vitesse d’avancement.
En grande largeur, l’outil qui alimente l’outil d’épandage est important
Dès que l’on travaille en grande largeur avec des rampes pendillards (>15 m), il faut être vigilant à l’alimentation du broyeur/répartiteur : il doit être correctement gavé pour maintenir le débit. Un débit de la pompe centrifuge va permettre une alimentation de l'outil d'épandage 2 à 2,5 fois plus volumineuse qu’un compresseur à palettes, garantissant ainsi une meilleure répartition dans la prairie.
Focus sur la certification Eco-Epandage
La certification Eco-Epandage est une démarche mise en place par les acteurs des engrais organiques. Les principaux critères évalués sont la conformité réglementaire, des performances agronomiques (respect des doses et de leur répartition transversale et longitudinale, respect des doses, respect des sols), et l’ergonomie et le fonctionnement de la machine.
L’évaluation se fait sur un banc d’essai d’IRSTEA, sous le contrôle de l’organisme certificateur Certipaq. La certification résulte d’une démarche volontaire du fabricant qui soumet sa machine à plusieurs passages au banc d’essai, simulations par logiciel et sondages auprès des utilisateurs.
En 2011, Pichon et Rolland répondaient à l’appel à projet du Ministère de l’Industrie visant à garantir des épandages intelligents et tracés. Avec le soutien de l’IRSTEA*, des chambres d’agriculture de Bretagne, de VetAgro Sup, ils ont créé le référentiel de certification de machines d’épandage de matières organiques. La première certification environnement agricole : éco-épandage est officiellement lancé en janvier 2014 par APS, filiale d’Axema. Pour en savoir plus sur la certification Eco-Epandage.
• : Institut National de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture