Le mode d’exploitation de la prairie influence la valeur nutritive des fourrages

Dans le Massif-Central, une expérimentation d’Inrae a mis en avant l’importance du mode d’exploitation pour améliorer la valeur alimentaire des fourrages. Couper ou pâturer plusieurs fois entraîne un fourrage de meilleure qualité l’année suivante.

« L’estimation du stade phénologique telle qu’elle est réalisée actuellement, n’est pas une mesure objective pour qualifier la valeur nutritive d’un fourrage », entame Donato Andueza, ingénieur à l’Inrae, à la suite de l’une de ses publications. En effet, il constate que la valeur nutritive d’une prairie est plus liée à son mode d’exploitation. Ainsi, plus une prairie est fauchée ou pâturée, plus la valeur nutritive de cette même prairie sera élevée l’année suivante en début du cycle. Par contre, cette valeur chutera plus rapidement au cours du cycle de production. « Il n’y a pas une explication claire à ce constat à moins de prendre en compte l’âge de la plante », explique-t-il. En effet, plus la plante est coupée, plus elle a tendance à mettre en place de nouvelles tiges l’année suivante. Il évoque également un différentiel de quantité de matières mortes et de composition chimique entre une prairie exploitée régulièrement et une qui l’est moins. Aussi recommande-t-il de prendre en compte certes la méthode de la somme des températures mais aussi le mode d’exploitation ou la date de la dernière exploitation pour estimer la valeur nutritive d’un fourrage.

Intensif versus extensif

« Dans l’expérimentation, six espèces de graminées de prairie ont été semées chacune en trois exemplaires dans des mini-parcelles de 6x1,5 m2, dans le Massif-Central à 350 m d’altitude. L’ensemble de ces 18 parcelles constituait un « dispositif ». Deux dispositifs ont donc été semés. Un des dispositifs a été conduit de manière extensive, sans fertilisation, avec une fauche en juillet. L’autre, conduit de manière intensive, a reçu 180 kg d’azote et a été coupé trois fois, en juillet, septembre et fin octobre. L’évolution de la valeur nutritive des fourrages issus de ces deux dispositifs, dont l’herbe a été coupée à quatre dates au cours du premier cycle de végétation, a été évaluée par la suite, résume Donato Andueza. Nous avons volontairement mis beaucoup d’azote pour réaliser un réel différentiel entre les deux dispositifs, ce qui dans la pratique n’est évidemment pas réalisable ». Au final, l’année suivante, « le dispositif conduit extensivement ne présente pas d’espèces dont le développement est normal par rapport au dispositif conduit intensivement. Un décalage dans le développement de l’inflorescence ainsi qu’une diminution du nombre de talles en montaison sont observés, constate-t-il. Le dactyle aggloméré n’épi pas autant. Le vulpin des prés épi peu également. Les épis du ray-grass et de la fétuque rouge se développent beaucoup plus tardivement, soit à une période où normalement les foins ont déjà été récoltés. Néanmoins, pour la fétuque ovine, cela ne change pas grand-chose. ».

Des stades phénologiques modifiées par la conduite

La valeur nutritive des fourrages obtenus dans le dispositif intensif est très élevée en début de saison (400° jours), tout comme la teneur en matières azotées totales, mais elle baisse rapidement au cours du cycle de végétation. A l’inverse, en extensif, la valeur nutritive des fourrages est moins élevée en début du cycle mais reste assez stable et ne baisse que très peu entre 800 et 1600°J. A noter également qu’à 800°J, dans le dispositif conduit en intensif, de nombreuses plantes au stade reproductif s’observent dans la parcelle, contrairement à celles de la prairie conduite en extensif. Ces constats font dire à Donato Andueza que « pour récolter des fourrages intéressants sur le plan alimentaire et donc conservés durant l’hiver, mieux vaut utiliser la parcelle plusieurs fois l’année précédente ou l’utiliser à une date tardive à l’automne ou l’hiver, en fauche ou pâturage, et couper tôt l’année suivante. Pour faire juste du foin, en mode extensif, autant couper un peu plus tard, fin juin voire début juillet ».

Un retard dans la phénologie des plantes

Donato Andueza a constaté une très grande variabilité de stades phénologiques dans une prairie au point qu’utiliser le stade phénologique comme indicateur de fauche n’est pas totalement pertinent, selon lui. De fait, « le rapport tiges/feuilles n’est pas toujours un bon indicateur de la valeur nutritive d’un fourrage », analyse-t-il. De même, il déconseille de produire du foin sur des parcelles fauchées une seule fois dans l’année, comme « cela peut se pratiquer en montagne à certains endroits. » Pour lui, il est essentiel que « l’éleveur garde en tête que c’est lui le maître de la valeur alimentaire de sa prairie ! ». A travers cette expérimentation et en fonction de ses objectifs, l’éleveur pourra améliorer cette valeur nutritive en lien avec un certain nombre de coupes ou de passages d’animaux. A l’avenir, pour Donato Andueza, l’un des objectifs est de continuer à étudier l’impact de « certaines opérations mécaniques, effectuées sur les prairies, sur la valeur nutritive des fourrages » et de déterminer des « outils de pilotage pour tirer profit de la variabilité de la valeur des fourrages par l’agriculteur ».

evolution de la phnéologie et valeur nutritiveretard phénologique selon les espèces

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