On peut être une prairie de mélange et exiger une fertilisation azotée !

Les légumineuses ont la particularité de fixer l’azote de l’air contenu dans le sol grâce à leurs racines où vivent, dans des nodosités, des bactéries. Cet azote devient alors disponible pour la plante et les plantes proches. Dès lors, dans le cas de prairies associant des légumineuses avec des graminées, comment faut-il raisonner la fertilisation azotée ?

De la théorie…

Les mélanges graminées / légumineuses bénéficient de la fixation symbiotique d’azote atmosphérique par la légumineuse. Par exemple, 1 tonne de MS de trèfle blanc fixe environ 40 kg d'azote. Pour une prairie qui produit 9 tonnes MS/ha et qui associe graminées et trèfle blanc (40%), la prairie bénéficie d’un apport symbiotique de : 9 x 0,4 x 40 = 145 kg N, en plus des fournitures par le sol.
Le GREN Bretagne (Groupement Régional d’Expertise Nitrate) propose le tableau ci-dessous de restitution d’azote en fonction du peuplement de légumineuses dans la prairie et du rendement en t MS/ha.
Pour un taux de légumineuses inférieur à 10 %, on considère que la prairie d’association fonctionne comme une prairie de graminées pures, sans fourniture d’azote par les légumineuses.
Pour un taux de légumineuses compris entre 10 et 30 % au printemps, la contribution totale des légumineuses à l'alimentation azotée de la prairie est à prendre en compte pour l'intégrer dans le calcul de la dose d'azote.
Lorsqu'il est supérieur à 30 %, au mois de juin de préférence, on peut considérer que le transfert d’azote des légumineuses vers les graminées suffit pour satisfaire la totalité des besoins en azote de la prairie.

Quantité d'azote fournie en fonction du taux de légumineuses pondéré annuel (GREN)
Production de la prairie t MS/ha Moins de 10 % 10 à 30 % Plus de 30 %
5 0 40 - 30 Apport total limité à un maximum de 50 kg N équivalent engrais en début de saison
6 0 50 - 40
7 0 55 - 45
8 0 65 - 50
9 0 70 - 55
10 0 80 - 60
11 0 87 - 67
12 0 95 - 75
Les valeurs en noir correspondent à la quantité d'azote fournie par le trèfle blanc
Les valeurs en vert correspondent à la quantité d'azote fournie par les autres légumineuses

 

…à la pratique

Les sources d’azote sur une exploitation sont les engrais de ferme, la fourniture par le sol, la fourniture par les légumineuses, l’azote restitué au pâturage et, éventuellement, un complément minéral. Mais si on se place le premier janvier, à quel moment ces sources d’azote deviennent elles disponibles pour la prairie ?
Pierre-Vincent Protin, Ingénieur Recherche en Production fourragère chez Arvalis explique :
« Du 1er janvier jusqu’à la sortie d’hiver, rien n’est en route. La minéralisation de l’azote du sol ou des fumiers n’est pas active, il n’y a bien sûr aucun pâturage et la symbiose avec les légumineuses ne se fait pas car les températures sont trop basses. Il n’y a donc pas d’azote disponible en sortie d’hiver pour la prairie. »
Or, comme le précise Marc Lambert, agronome chez Yara : « Dans un mélange légumineuse/graminée, il ne faut pas oublier la précocité de la graminée qui démarre plus tôt. Les légumineuses partant plus tard, il faut profiter au maximum de la pousse printanière pour engranger un maximum de stock fourrager. Je pense qu’il y a plusieurs raisons qui justifient la fertilisation des associations, mais si on doit en choisir une seule, je dirai que c’est celle là : booster la pousse précoce ».
Pierre-Vincent Protin va dans le même sens : « Malgré toutes les sources d’azote possibles, il reste nécessaire d’utiliser de l’azote minéral en sortie d’hiver, que ce soit pour la production du premier cycle ou lorsque la prairie est installée ».
Ainsi, si on reprend les sources d’azote possibles et qu’on les classe par ordre de disponibilité à partir du premier Janvier, on obtient le classement suivant :

  1. Azote minéral : pour le coup de boost.
  2. Azote du sol : c’est le premier poste de fourniture, surtout dans des zones comme le Grand-Ouest qui connaissent un hiver doux et humide qui permet une minéralisation résiduelle.
  3. Les engrais de ferme : ils sont généralement apportés à l’automne, l’azote devient disponible au début du printemps.
  4. L’azote fournit par les restitutions au pâturage
  5. L’azote fournit par les légumineuses, qui commence vraiment entre le 15 mars et le 15 avril, pour atteindre son maximum de production durant l’été.

Une autre raison d’apporter de l’azote minéral nous est livrée par Romain Legère, le directeur d’exploitation de la ferme de La Jaillière / Arvalis - Institut du Végétal : « Nous avons des prairies qui associent RGA et TB (70 % / 30 %) et sont essentiellement destinées à la pâture de nos vaches laitières et à la fauche. On met toujours un peu d’N, environ 30-40 unités N pour garder ce ratio, pour réguler la légumineuse de façon à avoir des fourrages homogènes et maintenir la graminée au dessus quand les bêtes sortent au pâturage. »

A quel moment apporter cet azote minéral sur les prairies d’association ?

Les besoins des graminées fourragères sont précoces et dans les prairies d’association, « la règle des 200° C jours est valable, par extension des préconisations obtenues sur graminées pures » explique Pierre-Vincent Protin. Ce qui signifie d’un point de vue pratique que vous pouvez donc utiliser l’application Date’N Prairie pour vos prairies d’association.
« Par ailleurs, il est également très intéressant d’apporter de l’azote, minéral ou organique, à l’implantation d’une prairie de mélange, si les reliquats azotés du précédent cultural sont trop faibles, car à l’implantation, les nodosités ne sont pas installées. Dans ce cas, une dose de 10 à 20 unités d’N est favorable à l’installation des prairies de mélange et suffisante car à l’implantation, il y a très peu de biomasse. » ajoute M. Protin.

vaches en train de pâturer

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